mardi, janvier 25, 2005

A380 contre ipod

Dans l'un de ses éditoriaux, « Business Week » revient sur la cérémonie de lancement de l'A380. L'hebdomadaire de souligner une nouvelle fois à quel point « cet énorme avion à deux ponts est un oiseau impressionnant », mais surtout « un remarquable étalage de prouesses technologiques et industrielles », qu'il s'agisse des matériaux composites utilisés pour alléger son poids ou bien de la flotte de barges et de camions gigantesques qui ont servi pour transporter à Toulouse ses énormes composants.

Autant « Business Week » ne semble pas douter du succès commercial de cet avion, même s'il souligne qu'avec 149 commandes fermes rien n'est encore acquis pour ce projet dont le point mort sera atteint lorsqu'il comptera enfin 250 achats. Autant l'hebdomadaire s'interroge sur les leçons que les chefs d'Etat présents le 18 janvier à Toulouse ont voulu tirer de cet événement en affichant « leur enthousiasme pour la création de champions européens dans les domaines du transport, des télécoms et de l'énergie ».

« Le problème, souligne «Business Week», c'est que les gouvernements sont bien connus pour leur maladresse à choisir les bons champions industriels. La France, par exemple, a consacré des milliards à tenter de bâtir une industrie informatique nationale. » Aussi l'hebdomadaire américain recommande plutôt aux gouvernements de doper les efforts en matière de recherche et de développement, dont les dépenses représentent 2 % du produit intérieur brut alors qu'elles atteignent 2,8 % aux Etats-Unis. Et l'éditorialiste de conclure en affirmant que l'Europe serait bien avisée d'améliorer les crédits d'impôts pour la recherche, de faciliter les formalités ou d'alléger le fardeau fiscal qui pèse sur les start-up. « Le super jumbo Airbus est impressionnant, rappelle-t-il. Mais l'iPod d'Apple Computer l'est tout autant. »

Je ne vous étonnerais pas (si vous avez lu mes messages précédents) en vous disant que l'intervention étatique en économie (1) me paraît illégitime et inefficace. Les échecs (aurais je la cruauté de rappeler Bull et le Crédit Lyonnais ?) sont plus nombreux que les réussites.

C'est pourquoi l'idée d'agence de l'innovation me fout une trouille bleue : encore un machin couteux et néfaste.

L'Etat veut faire quelque chose pour l'industrie, sans effets secondaires dévastateurs parce que partant d'un principe économique sain ? Facile : qu'il annule le déficit et qu'il réduise la dette. Sans même baisser les impots, l'effet serait positif.

Mais j'ai bien peur que, pour la génération actuelle de politiciens, l'idée que ce que l'Etat puisse faire de mieux dans certains cas, c'est de ne pas s'en mêler, de ne pas avoir d'avis, est irrémédiablement perdue.

(1) pour moi, "intervention étatique" s'oppose à "politique économique", qui consiste non pas à orienter le cours de la vie économique mais à fournir un cadre réglementaire stable, clair et stimulant. Donc, suivant cette définition, tout ce qu'on nomme aujourd'hui "politique industrielle", c'est de l'interventionnisme (fébrile) et non de la politique.

Par exemple, un débat public sur la bio-éthique, sur la génétique, sur les cellules-souche (débat qui a eu lieu chez ces ignares d'Américains pendant les présidentielles) permettrait de fournir au entreprises de recherche en biologie un cadre réglementaire stable car issu d'un processus démocratique.

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