samedi, décembre 31, 2005

La rupture sarkozyenne en action (2)

Alire cet extrait du courrier des lecteurs des Echos, dont je partage le propos ne fait que renforcer mes doutes, mais faute de grives ...

Je donne bien raison à l'épistolier : "Seuls les historiens y trouveront intérêt, en constatant que depuis 1789 notre pays a pu traverser les évolutions les plus marquantes de l'humanité sans que son peuple ait fondamentalement progressé."

Je suis plongé dans la lecture passionnante de Quand l'Europe parlait Français de Marc Fumaroli et je suis attristé de constater à quel point nos moeurs n'ont guère évolué depuis le "beau XVIIIème siècle" et, si elles ont évolué, c'est plutôt vers plus de barbarie, vers plus de cuistrerie.

Bien sûr, on a importé le "politiquement correct" d'outre-Atlantique, on ne dit plus "sourd" mais "mal-entendant". Toutefois, quand on voit un handicapé se rapprocher d'un passage clouté, on garde l'habitude d'accélèrer, pour ne pas perdre quelques précieuses secondes à le laisser passer.

Nous sommes toujours aussi habiles à manier les grandes idées plutôt que les petites réalités, mais c'est pour mieux excommunier, anathémiser, exclure, au nom des idées, les plus nobles et les plus généreuses, cela va de soi. Quand je pense à ce pauvre Finkielkraut, quel naïf ! A son âge, tout de même ! Ne pas avoir compris qu'en France, on peut tout dire, sauf ce qu'on ne peut pas dire.

Finalement, je ne regrette pas vraiment que Montaigne soit quasi-oublié : Dieu sait quelles fadaises en aurait fait notre époque si prompte à la récupération.

La fausse rupture de Nicolas Sarkozy

Fin octobre, Nicolas Sarkozy publiait dans vos colonnes un point de vue titré « OMC et agriculture : non au marché de dupes ». Ce texte donne la vraie mesure de la « rupture » qu'il préconise face aux errements de ses collègues et rivaux. Jusqu'à présent, les réalisations de Nicolas Sarkozy, au-delà des propos musclés, ont été loin de marquer une quelconque rupture avec les pratiques de la droite. Elles avaient surtout conforté ses plus navrantes pratiques. La création du Conseil français du culte musulman, que rien n'imposait, n'a servi qu'à donner une vitrine légale à l'islamisme, que Sarkozy jure par ailleurs d'éradiquer. Le traitement des affaires Alstom et Sanofi a été caractérisé par le protectionisme et la volonté farouche de ne pas laisser l'Allemagne, pourtant l'un des rares pays développés à ne pas nous exécrer, prendre quelque intérêt dans ces affaires, obligatoirement « stratégiques » aux yeux de dirigeants au patriotisme économique éprouvé.

Si la pratique ne laissait guère de doutes sur la réalité de ses convictions, le discours continuait à faire illusion. Après le consternant message sur l'indispensable maintien en l'état d'une politique agricole commune catastrophique pour l'Europe et pour le « développement durable » cher, dit-il, à notre monarque, le doute n'est plus permis quant à l'étendue de la « rupture » dont Sarkozy est porteur. Le Premier ministre, qui pronostiquait que les « ruptures se terminent dans le sang », devrait être pleinement rassuré, ce n'est pas de ce côté-ci que pourra venir le flot d'hémoglobine. Par contre, il ferait bien de se demander si sa politique, maintenant épousée par son seul rival à droite, ne nous conduit pas à un bain de sang.

Lorsque la seule ligne politique, depuis des décennies, a été de donner raison aux revendications catégorielles dès lors qu'elles s'exerçaient de façon violente et en dehors de toute légalité (SNCF, SNCM, EDF, syndicats de pêcheurs ou d'agriculteurs), et quand cette politique s'est exercée au détriment des quelques directives de bon sens préconisées par Bruxelles, tout le monde devrait bien sentir que nous sommes arrivés à un point de rupture. (...)

Droite et gauche confondues nous haïssons l'idée même de « liberté », un mot qui a, comme celui de « fierté », disparu des discours. Le jour se rapproche où nous devrons en payer le prix en nous mettant au ban de la Communauté européenne, sans pour autant trouver une structure d'accueil, et en laissant les bandes organisées mettre ce pays encore plus en coupe réglée qu'elles ne l'ont fait. Seuls les historiens y trouveront intérêt, en constatant que depuis 1789 notre pays a pu traverser les évolutions les plus marquantes de l'humanité sans que son peuple ait fondamentalement progressé. Retournons vite à ce qui compte vraiment : les compétitions internes au PS et à l'UMP, et la prochaine Coupe du monde de foot.

JEAN-MARC COURSIÈRES 69330 Jonage

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