lundi, janvier 16, 2006

ATTAC et les OGM : de l'obscurantisme à la barbarie


Par Jacques Guénin, décembre 2005



De même que l'on trouve chez ATTAC des gens de bonne volonté intoxiqués par la propagande, on y trouve, en cherchant bien, des gens qui se posent des questions sur la pertinence de faucher les champs d'OGM. Ceux là expliquent benoîtement qu'ils ne sont pas a priori contre les OGM, ils demandent seulement que l'on n'en plante pas tant que l'on n'aura pas établi leur absence de nocivité au moyen de recherches appropriées. On se demande alors pourquoi le bouffon violent José Bové et ses acolytes ont commencé par le sabotage des installations de recherche. Le 5 juin 1999, dans notre beau pays de France, dans cet Etat de droit où l'on apprend à l'école qu'il ne faut pas se faire justice soi-même, une centaine de personnes appartenant à la Confédération Paysanne, conduites par José Bové et René Riesel, pénétrèrent par effraction dans une serre du Cirad, organisme public de recherche agronomique. Devant les journalistes convoqués pour l'occasion, la bande procédait à la destruction d'ordinateurs et de milliers de plans de riz, génétiquement modifiés pour améliorer leur résistance à la sécheresse et la salinité. Incidemment, elle détruisait aussi l'émulation salutaire qui existait entre le Cirad et l'université de Cornell qui faisait des travaux sur le même sujet.

Certes, René Riesel, l'ancien secrétaire national de la confédération paysanne, a quitté la confédération au moment de l'épisode Mc Donald, et s'est démarqué à la fois de Bové et d'ATTAC. "ATTAC et les citoyennistes, dit-il, sont des néo-étatistes... ils ne sont que d'anciens gauchistes, d'anciens staliniens, qui modernisent un peu leur discours". Mais ladite confédération figure toujours en temps que personne morale au Conseil d'administration d'ATTAC, qui accorde toujours un soutien sans faille à José Bové, lequel d'ailleurs le lui rend bien. Jacques Dufour, président de la Confédération Paysanne, est membre du comité directeur d'ATTAC. Plusieurs fédérations éprouvent spontanément le besoin de soutenir les fauchages sauvages par des articles dans la presse. Ainsi, suite à l'action anonyme de destruction d'une parcelle de maïs OGM à Magescq (Landes), dans la nuit du 23 au 24 août 2004, le Comité ATTAC Landes Côte Sud a déclaré approuver cette destruction dans le quotidien Sud-Ouest : "Cette action s'inscrit dans un climat d'opposition générale aux essais et cultures d'OGM marquée en cet été par de nombreuses destructions clandestines ou à visage découvert". ATTAC se déclare "solidaire de tout citoyen impliqué dans de tels faits qui pourrait être menacé de poursuites judiciaires, suite aux plaintes qui ne manqueront pas d'être déposées."
Incroyable mais vrai!

Le comportement d'ATTAC sur ce sujet révèle à quel point la soumission à une idéologie peut fermer toute ouverture à la connaissance, peut rendre insensible aux incohérences et peut faire perdre toute capacité de réflexion. Nous allons examiner successivement ces trois points :


L'ignorance ou le refus de savoir.

Il y a une dizaine d'années, on pouvait se demander si les OGM ne présenteraient pas de toxicité pour le bétail et pour les humains, et s'ils ne risquaient pas de contaminer d'autres cultures. Certains transgènes confèrent en effet aux plantes un avantage sélectif. Ces plantes pourraient alors devenir envahissantes et menacer la flore locale et la biodiversité. On pourrait alors craindre par exemple la contamination de plantes dites biologiques.

En France, nous avons moins avancé dans l'étude de ces questions que d'autres pays, malgré la qualité de nos organismes de recherche, précisément parce que ces organismes sont obligés d'opérer à petite échelle et en secret pour éviter le vandalisme des valeureux barbares intoxiqués par José Bové. Mais d'autres pays ont tellement avancé, qu'ils ont non seulement circonscrit les problèmes, mais prescrit et contrôlé les précautions éventuelles, si bien qu'ils ont pu autoriser la plantation d'OGM à grande échelle. Résultat : il y a aujourd'hui de par le monde plus de 90 millions d'hectares cultivés en OGM, dont plus de 50 aux Etats-Unis, 16 en Argentine, 5 au Canada et au Brésil, et 4 en Chine. Les variétés cultivées son essentiellement le soja, le maïs, le colza, le coton et le riz. Ces cultures sont pratiquées par 8,5 millions d'agriculteurs dans 17 pays. Comme il y avait déjà 1,7 millions d'hectares en 1996, c'est à dire il y a dix ans, on peut dire que cette progression n'est pas récente et qu'on a eu tout le loisir d'en mesurer les effets. On n'a pas encore noté un seul cas d'intoxication ou de conséquence négative sur l'environnement, au contraire, comme nous le verrons plus loin.

Lorsqu'on connaît ces faits, les élucubrations et l'agitation de la Confédération Paysanne et d'ATTAC apparaissent tout simplement grotesques, consternantes, et on ne peut qu'avoir honte pour eux.

L'incohérence doctrinale

Elle porte sur le combat contre la pauvreté et la protection de l'environnement, deux sujets qui motivent beaucoup les gens d'ATTAC si on en croit leur propagande.
En ce qui concerne le premier point, il est clair aujourd'hui que les OGM représentent un immense espoir pour les pays pauvres, aussi bien sur le plan de la nourriture que sur celui de la lute contre les maladies. Ils permettent de créer des plantes ayant des propriétés particulièrement utiles aux paysans pauvres qui n'ont pas les moyens de lutter contre les maladies des plantes ou d'acheter des engrais : résistance aux maladies (qui sont responsables de la perte de 30 pct des récoltes), résistance aux herbicides, amélioration des qualités nutritives et du goût, adaptation aux sols salés ou alcalins, résistance au froid et aux courants d'air, détoxification des sols par captation de métaux lourds, production de molécules utilisables pour fabriquer des huiles, des détergents, des fibres, et même des combustibles pour se chauffer.

Les feuilles ou les graines de certaines plantes transgéniques peuvent être une source bon marché de protéines ayant des propriétés thérapeutiques (insuline, hormone de croissance, interféron, anticorps divers, etc.)

Certaines plantes transgéniques, comme le riz doré, pourraient contribuer à réduire les graves déficits en vitamine A et en fer qui frappent un nombre considérable d'êtres humains.

Des chercheurs de l'Université Cornell, aux Etats-Unis, ont mis au point un riz à concentration élevée en tréhalose, un sucre que l'on trouve aussi chez les bactéries, les champignons et les invertébrés et qui permet une résistance accrue à la sécheresse et à la teneur du sol en sel. Ce riz est capable de résister à des sécheresses intenses et de renaître à la moindre goutte de pluie. De même, il survit dans des sols contenant 50% plus de sel que les zones de culture considérées comme très salées. Enfin il supporte des températures inférieures de dix degrés à celles que peut supporter la variété non transgénique.

Des chercheurs de la même université ont créé une variété de banane qui contient un vaccin contre l'hépatite B. Une seule banane inocule le vaccin à un enfant pour un cinquantième du prix d'une piqûre, et avec moins de larmes.

Il en va de même pour la protection de l'environnement. Une bactérie, le Bacillus Thuringiensis (BT), contient une protéine qui tue trois espèces de vers meurtriers pour le coton. Le BT était utilisé depuis 1950 sous forme d'insecticide répandu par hélicoptère. En Inde, de tels traitements étaient répétés une dizaine de fois par an, ce qui coûtait évidemment très cher et avait des effets écologiques négatifs. Aujourd'hui le "BT cotton", une variété transgénique dans les graines de laquelle on a introduit la bactérie BT, permet d'éviter ces traitements, donne un meilleur rendement et une fibre de meilleure qualité. Cette bactérie a aussi été introduite dans le maïs pour les mêmes raisons.

Aux Etats-Unis, sur la période 1996-2004, l'utilisation de soja génétiquement modifié a fait économiser 19 000 tonnes d'herbicides, et l'utilisation de maïs transgénique a réduit de 5 800 tonnes la consommation d'insecticides.

La perte de la capacité de réflexion.

Un des griefs mis en avant par les barbares est que le développement des OGM est fait par des compagnies privées pour accroître leurs profits au détriment du tiers monde. C'est faire preuve d'un manque de réflexion qui confine à la stupidité :

- d'abord parce que beaucoup de découvertes utiles sont faites dans des universités et des instituts de recherche publics. Or ce sont celles là que les barbares détruisent, car les compagnies privées se protègent mieux.

- ensuite parce que les sociétés privées ont une incitation beaucoup plus forte que les organismes publics à ne pas commettre d'erreur sur le plan de l'environnement ou de la santé. Pour elles c'est simplement une question de survie.

- enfin parce qu'elles sont bien obligées de fabriquer des produits assez bon marché pour que les gens aient intérêt à les acheter.

Il est décevant d'avoir à expliquer des choses aussi évidentes.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire