mercredi, mai 23, 2012

Non au mariage homosexuel

Je vous recopie cette opinion parce que, au-delà de cette question du «mariage» homosexuel, je suis convaincu que les réformes dites sociétales (en réalité, très politiques) qu'on nous propose sont inspirées par un nihilisme profond. Tout se vaut, rien n'engage, n'héritons rien et ne léguons rien. Ni passé, ni futur, un éternel présent. Aucune responsabilité, aucune contrainte, que des désirs, que des droits, une éternelle enfance.

Non au mariage homosexuel

Par Chantal Delsol


Dans un pays très affecté par la crise économique, où beaucoup craignent pour leur emploi et celui de leurs enfants, les débats électoraux ont porté ­largement sur les dites «questions de société» - et tant mieux, car il est au moins aussi important de se demander: «Comment allons-nous vivre?» que de se demander: «Combien aurons-nous pour vivre?»

Ainsi, un certain nombre de citoyens n'ont pas voté Hollande, parce qu'il était entendu qu'il légitimerait aussitôt le mariage homosexuel (mesure qui ne coûte pas un sou et qui fait plaisir aux journalistes). Mais chacun savait bien que Sarkozy, lui, aurait fait la même chose quelque temps ou quelques années plus tard. On dirait bien que ce genre de mesure nous attend comme un destin grec! Un futur inéluctable, et cela est corroboré par la déclaration récente du président Obama. Dire le contraire ne serait pas moderne, et jetterait aussitôt un président dans les marges du populisme.

Pourquoi inéluctable? Parce que, dans nos sociétés, tous les arguments susceptibles de s'opposer à ces mesures sont d'ordre ­religieux. Et nos concitoyens n'ont plus de religion. Alors, on ne voit pas à quel titre on les empêcherait de faire n'importe quoi. Et tous les combats contre le mariage homosexuel ou l'euthanasie (pour ­prendre ces deux exemples récents) sont des combats le dos au mur, obsidionaux, et évidemment perdus d'avance: leur justification n'est comprise et partagée que par quelques arriérés dans mon genre.

Des chrétiens vont me répondre que le mariage homosexuel heurte la nature, et que la religion à cet égard ne fait qu'écouter la nature. Mais la nature a bon dos. Avec ce même argument, les catholiques prétendaient, il y a un siècle, que les femmes devaient souffrir pendant l'accouchement parce que c'était naturel… L'homme est un être de culture. Nous distançons et nous ­dominons sans cesse la nature, et c'est tant mieux. La difficulté consiste à savoir quelles limites il faut se garder de ­franchir, à partir de quand les dégâts dépasseront les avantages, et finalement, à partir de quand le progrès coûte trop cher.

On pourrait dire les choses ainsi:  c'est dans notre nature de dépasser la nature, et nous sommes vraiment humains quand nous le faisons ; mais c'est notre devoir de nous poser la question des limites, et nous sommes irresponsables et insensés si nous ne le faisons pas.

Ainsi, dans toutes les sociétés, les limites sont définies et précisées, chez nous jusque-là par la religion monothéiste qui a irrigué notre continent, ailleurs par les traditions, religieuses ou non. En Chine, la récusation du clonage s'appuie sur les traditions et sur la valeur consacrée de la famille et de la filiation. Seulement, chez nous, toutes les valeurs traditionnelles sont chrétiennes, et quand la chrétienté s'efface, c'est comme si on nous retirait le sol sous les pieds - plus rien ne reste. C'est à dessein que je dis «rien». Car l'exigence du mariage ­homosexuel, et de l'adoption des enfants qui va avec, est un dessein nihiliste. Non parce qu'il va contre la «nature». Mais parce que, par principe, il refuse de ­débattre sur la question des limites: tout ce que je veux, et tout de suite, et quelles qu'en soient plus tard les conséquences. Deux facteurs suscitent ce nihilisme.

Le premier est la détestation de la religion, de ses dogmes et de ses interdits: et les adeptes de ces mesures sont clairement prêts à tout, et même à tout casser, pour briser définitivement des croyances ennemies. D'où la haine qui les porte, d'où une telle hargne qui les a portés (contre toute légalité ­démocratique, à force de menaces et de lobbying) à rendre illégale toute opinion contraire à la leur. De la même façon l'apologie de l'euthanasie atteint une hargne qui dépasse largement la compassion qu'on invoque: il s'agit bien d'une volonté fanatique de revenir au paganisme ordinaire - dans toutes les sociétés du monde, depuis la Grèce ancienne jusqu'à l'Inde moderne, on tue l'enfant-fille qui gêne, pour ne prendre que cet exemple.

Le deuxième facteur, c'est le remplacement des valeurs morales par l'unique critère de la souffrance et du désir individuels: empêcher deux homosexuels de se marier est inhumain, car enfin ils en souffrent.

Pourquoi les en empêcher puisqu'ils s'aiment? Avec ce raisonnement, on justifie n'importe quoi. Des Hollandais ont contracté un mariage à trois. Un jeune Australien s'est marié l'année dernière avec son chien. Des enfants de 10 ans pourraient se marier, s'ils s'aiment. Et aussi un père avec sa fille de 10 ans, s'ils s'aiment.

Lorsque plus rien n'arrête le désir, ni la religion ni la tradition, ni aucune sagesse plus haute, alors les dégâts ne sont pas loin. Nos contemporains, d'ailleurs, le savent bien, puisque dans tous les autres domaines ils militent contre la loi du désir tout-puissant:  face à l'environnement, face à l'économie. Dans ces domaines, ils sont conservateurs au bon sens du terme: au sens où nous devons conserver l'avenir. Pourquoi faudrait-il limiter nos caprices dans le but de protéger l'avenir des forêts ou celui des salariés, et non de protéger l'avenir de la famille et de la filiation?

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