samedi, septembre 24, 2016

Un cri dans la foule

Je suis en train de lire le livre du manipulateur en chef d'Hillary Clinton, Robert Cialdini, Influence et manipulation et c'est passionnant. Je vous ferai une recension à la fin de ma lecture.

Un de ces mécanismes de manipulation est la « preuve sociale » : je fais quelque chose parce que les autres le font. Si les autres le font, c'est que cela doit être ce qu'il faut faire.

Comme tous les mécanismes de manipulation, il est inconscient. Si vous l'amenez à la conscience, si vous vous dites « Je fais cela par imitation et non parce que j'ai fait une analyse qui me dit que c'est la chose à faire » vous le désamorcez en partie, mais seulement en partie, tellement il est puissant.

Tout le monde est énervé par les rires pré-enregistrés à la télévision et pourtant, les études montrent que les gens jugent plus comique une émission avec des rires pré-enregistrés que la même émission sans les rires alors qu'ils ont déclaré qu'ils n'aimaient pas ces rires.

C'est aussi ce mécanisme de preuve sociale qui explique les « micros-trottoirs », ces interviews d'hommes de la rue totalement incompétents : si de nombreuses personnes qui me ressemblent le disent c'est que cela doit être vrai.

Venons au sujet d'aujourd'hui.

Dans les années 70, un meurtre a eu lieu à New-York a duré vingt minutes et aucun des 38 spectateurs n'ait intervenu. La presse a accusé l'égoïsme des new-yorkais, les sociologues ont accusé la preuve sociale : personne ne bouge, c'est sûrement qu'il n'y a pas besoin de bouger, donc je ne bouge pas (rappelons que ce mécanisme est inconscient).

En effet, face à l'incertitude, nous sommes entrainés à rester stoïque. Donc, face à un événement inattendu, chacun, dans l'incertitude, va rester stoïque mais interpréter l'attitude stoïque des autres non comme une preuve d'incertitude mais comme une preuve qu'il ne faut pas bouger.

Ce mécanisme de passivité par preuve sociale est renforcé dans des conditions qui sont réunies en ville :

1) Incertitude. Pas toujours facile, dans le bruit et la fureur urbains, de faire la différence entre une scène de ménage et un meurtre, un accident bénin et un accident grave.

2) De nombreuses personnes autour de vous.

3) Les acteurs de l'événement vous sont inconnus.

Vous avez plus de chances d'être secouru à la campagne, par une personne qui passe par là et que vous connaissez.

Heureusement, tout espoir n'est pas perdu. Vous pouvez retourner la preuve sociale à votre profit.

Vous êtes en train de faire un malaise, vous venez d'avoir un accident, les passants vous jettent un coup d'oeil et continuent leur chemin. Ne criez pas « Au secours ! » à la cantonade (même si c'est mieux que rien, cela aide à briser l'incertitude), désignez une personne précise et donnez lui une mission « Vous, l'homme au costume bleu (en le pointant du doigt), je suis en train de faire un malaise, appelez les pompiers ».

Vous brisez l'incertitude et vous brisez aussi la preuve sociale (si les autres ne font rien, ce n'est pas parce qu'il ne faut rien faire, mais parce qu'ils n'ont pas compris).

Et vous retournez la preuve sociale à votre profit : la chose à faire par imitation, c'est de vous secourir.

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